29 sept. 2019

Un week-end particulier


Il y avait un moment que je m’en faisais une joie : aller enfin à la Fête de l’Huma, et avec mon fils !
Arrivés à midi le vendredi 13 septembre, un déjeuner aux Cadrans, puis arriver à rejoindre la Gare du Nord, où était situé notre hôtel, en ce jour de grève de la RATP.
Je ne râle pas : je soutiens les grévistes. Et nous trouvons assez vite un RER qui nous y emmène.
Gare du Nord : trouver l’hôtel. Il y a des quartiers de Paris que je connais bien, celui-là, pas du tout.
Trouvé ! Une chambre Booking chacun, un moment de repos et c’est parti.
Le RER D fonctionne normalement.
Il n’y a pas encore trop de monde à La Courneuve. Un contrôle très rapide, un bracelet jaune soudé au poignet, on y est.
On se disperse avec Joan. Premiers achats : t-shirts à messages. On se retrouve au stand du PCF des Pyrénées Orientales.
Encore un petit tour et repérage des endroits sympas pour dîner.
Ça sera le stand des Landes : foie gras, magret, croustade, Sauternes…
Puis j’essaie de voir des connaissances : pas facile dans cette foule qui a gonflé depuis notre arrivée.
Un salut aux camarades de Gardanne, partis pour faire la fête jusqu’au bout de la nuit.
Nous nous frayons un chemin vers la sortie : dur !
Retour à Gare du Nord, sommeil !
Samedi matin : un petit déjeuner dans une brasserie parisienne.
Direction St Michel, Joan a des adresses de magasins « à trésors ».
Nous les cherchons et les trouvons, il est heureux comme un gamin. Son sourire vaut de l’or !
Cette matinée ensemble, dans ce quartier que j’aime, fut calme, complice, très belle.
Nous nous redirigeons vers La Courneuve. Des flots y arrivent en même temps que nous. Trop, à notre goût.
La Grande Scène. Fabien Roussel vient de terminer son discours. La foule devant le chapiteau est dense, compacte.
Marc Lavoine est annoncé, acclamé. Je suis bien trop loin de la scène et le soleil tape fort. Je l’ai déjà vu sur scène, je le reverrai, nous continuons à essayer de nous frayer un chemin, cela devient étouffant.
Enfin, le village du livre !
Les Pinçon-Charlot ne sont pas derrière leur stand, mais je choisis quand même un de leurs livres.
Josiane Balasko est là, et je pense à Christophe qui l’adore. Son dernier bouquin, « jaméplu », sera dédicacé par elle pour lui.
Pierre Dharréville est là. Joan lui fait dédicacer un livre pour sa camarade. J’en prends un pour moi. Il prend le temps de discuter, il y a beaucoup de chaleur et d’humanité en lui. Sans doute un des moments les plus forts du week-end pour moi.
Repas au stand des signatures pour ADP et nous ressortons, oppressés par la foule.
Direction le retour à l’hôtel.
Et là, à l’approche de la station, je m’étale de tout mon long, avec le visage contre une barrière de sécurité.
Attroupement. Ce qui inquiète le plus c’est mon œil droit tuméfié. Mes lunettes neuves n’ont pas supporté le choc. Moi je sens surtout la douleur à la main droite et je vois mon poignet gonfler.
Les pompiers m’emmènent à l’hôpital de St Denis, Joan m’accompagne, plein d’attentions, inquiet.
Les urgences de l’hôpital de St Denis : la cour des miracles.
Un personnel très restreint. Des feuillets sur les murs où les soignants ont écrit des faits qu’ils ont vécu. De la violence essentiellement.
On me met sur un brancard et on me dit d’attendre. Joan est dans la salle d’attente.
Je dois aller réclamer que l’on me nettoie le visage, ensanglanté du côté droit.
Je demande à ce que Joan vienne près de moi. J’essuie un net refus par une première personne. Têtue, je demande à une autre personne qui finit par le laisser me rejoindre. L’attente qui s’annonce m’inquiète plus pour lui que pour moi.
Une interne vient tâter mon poignet, m’envoie à la radio.
Je passe la radio et je reviens attendre, cette fois dans une salle d’où l’on peut observer les allées et venues. Joan est là, mon réconfort.
Aux urgences, à minuit passé, on voit un échantillonnage étrange de population.
Des cris, des propos incohérents, des paroles de vengeance « sur le Coran ».
On relativise la chance que l’on a de vivre dans un milieu calme, privilégié.
La détresse des « quartiers » est bien là, palpable, triste.
On vient me dire que c’est cassé, qu’il faut plâtrer.
On me fait un plâtre à l’ancienne, lourd, blessant par endroit. Mais, ouf, nous pouvons ressortir de ce lieu sordide.
Mais comment rejoindre notre hôtel à 2h30 du matin, nous ne savons même pas où nous sommes.
L’hôpital nous suggère Uber. Les taxis ne se déplacent pas dans ces coins de banlieue la nuit.
Effectivement, c’est un Uber que nous arrivons à obtenir, assez rapidement, grâce à Joan qui se débrouille comme un chef.
Nous traversons le quartier de la Porte de la Chapelle.
Des tentes de fortunes, des attroupements de personnes à l’air perdu : des migrants, abandonnés là à leur sort. L’inhumanité.
L’hôtel enfin.
Pas facile de dormir avec un bras plâtré et douloureux, mais il y aura des nuits meilleures.
Joan est là le dimanche matin pour m’aider à ranger mes affaires.
Je ne sais rien faire de la main gauche.
Dans la glace je vois mon œil droit entouré de violet…
Notre train part en début d’après-midi et nous sommes impatients de nous retrouver en territoire connu.
Joan envoie à mon amoureux une photo de mon visage décoré, pour que la surprise soit moins grande pour lui à notre arrivée.
Le regard des gens vers mon œil est pénible. Dans le contexte actuel on pense « femme battue »…
Enfin Aix, je m’écroule en larme dans les bras de mon amoureux, puis un peu plus tard dans ceux de Joan. Toute une émotion gardée depuis des heures qui sort.
J’ai un fils qui m’a soutenue, deux hommes qui m’aiment.
Maintenant apprendre la patience.
L’horrible plâtre a été remplacé par une belle orthèse bleue.
Et jusqu’à fin octobre j’apprends à être gauchère.
Je suis entourée d’attention.


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