27 août 2020

Un crapaud, deux grenouilles et un flamant.

 


Ma vie n’a décidément pas été un long fleuve tranquille.

Peut-être aussi que je n’étais pas faite pour une vie sage et rangée et qu’il fallait que je passe par de nombreuses étapes avant de retrouver le bonheur sérénisant que je vis depuis 15 ans.

Dans ma vie il y a eu un crapaud.

Il s’appelait Thierry et portait beau. Il était d’ailleurs attentif à son apparence et savait qu’il pouvait plaire.

D’ailleurs il m’a plu, début 1999.

Ma grande maison où je vivais avec mon fils orphelin de père, adolescent et plus souvent avec ses copains qu’avec moi, me pesait.

L’idée qu’un homme s’y installe ne me déplaisait pas, et il a assez vite posé ses affaires chez nous. Il faut dire qu’il n’avait pas vraiment de chez lui.

Cet homme était à l’opposé de mes idées, vantait des valeurs traditionnelles qui n’étaient pas les miennes, était « border line » dans ses activités professionnelles d’infographiste peu débordé.

Mais il me faisait rire, m’accompagnait. Si j’étais parfaitement consciente qu’il ne serait pas l’homme de ma 2ème partie de vie, il remplissait un vide dans cette grande maison où il faisait du feu dans la cheminée l’hiver.

Avec Joan il y avait une certaine entente, des rires. Et quand je sentais que la jeunesse qui défilait à la maison l’ennuyait, c’est toujours la défense de Joan que j’ai prise.

Cet homme avait un lourd passé dont il parlait peu, mais que je découvrais au fur et à mesure.

Il avait eu une fille, avec « Ma Béa », dont j’ai longuement parlé dans un article publié dans ce blog en décembre 2013.

Elle s’appelait Cyrielle, elle vivait avec sa mère près de Troyes, il ne pouvait pas la voir et elle était protégée par une mesure d’assistance éducative.

Je l’ai accompagné une fois au tribunal de Troyes, où il était convoqué. Je n’ai pas pu apercevoir la maman de Cyrielle. Mais je sais que cette audience s’est mal passée et qu’il n’avait toujours pas le droit de voir sa fille.

En décembre 1999, il est parti à Troyes, je savais qu’il avait l’intention d’enlever sa fille. Je l’avais juste prévenu que s’il revenait avec sa fille dans l’illégalité, ils ne mettraient pas un pied dans la maison.

J’ai pris une journée de congé et j’ai remué ciel et terre pour trouver la trace de la maman de Cyrielle. Grâce aux services sociaux elle a pu être prévenue et partir chez sa mère, en Savoie.

Il est arrivé sur place, furax de trouver porte close. Il est parti en Savoie où Ma Béa, qui avait trouvé refuge, a su aussi se dissimuler.

Il est revenu à la maison, furieux, et à des lieux de se douter que j’avais fait s’écrouler son projet.

Entre Noël et le Jour de l’An, je lui ai demandé de quitter la maison avant l’arrivée de l’an 2000.

Après avoir essayé de jouer de son charme pour me faire changer d’avis, après m’avoir proposé de créer une société dont je serais la patronne, il a compris que je ne changerai pas d’avis et il a embarqué ses quelques affaires et son matériel de travail dans un camion de location.

Je n’étais pas là, mon fils oui, il m’a dit qu’il pleurait.

J’ai entamé l’an 2000 sous de nouveaux auspices. Il me réservait de belles surprises : la rencontre d’un écossais, dont j’ai déjà parlé ici, et Pascal avec qui j’ai passé d’agréables moments jusqu’en 2003.

La maman de Cyrielle est arrivée à me joindre pour me remercier d’avoir déjoué les plans du crapaud.

A partir de là nous avons correspondu, je suis allée la voir, elle est venue s’installer à Istres, nous avons vécu 4 années d’amitié profonde.

C’était ma grenouille, j’étais sa grenouille.

Le crapaud resurgissait de temps en temps aux abords de l’école de Cyrielle. Avec Joan et mes amis nous avions établi un « tour de garde » pour qu’il y ait toujours un rempart de sécurité pour la protéger. Ce n’était pas un homme courageux.

Pendant 4 années, Ma Béa et Cyrielle faisaient partie de ma vie.

Début 2004, je me suis investie sérieusement auprès de l’organisation syndicale qui correspondait à mes idées.

Cette organisation syndicale m’a proposé de me faire muter à Montpellier, la région Languedoc Roussillon étant peu représentée syndicalement. Joan était adulte, Montpellier n’était pas si éloigné de mes amis et de ma famille, j’ai aimé l’idée, j’ai dit oui.

Pensant que cette mutation serait rapide, j’ai commencé à me demander où j’avais envie d’habiter : Montpellier ? Sète ?

J’en parle avec le compagnon d’un ami, Éric, qui venait d’être muté à Béziers. Je m’entendais bien avec lui, bien que ne le connaissant que depuis peu. Il me propose que l’on cherche un appartement en co-location. Je ne mets jamais longtemps à prendre une décision, je dis banco. Je dirais même que l’idée m’amusait.

Quelques personnes m’ont mise en garde sur le fait que je m’engageais avec quelqu’un qui était rentré dans mon cercle de connaissances depuis peu.

Mais Éric a su lier très rapidement une relation très proche, il a cherché activement un appartement et l’a trouvé. A Béziers. Nous nous sommes engagés conjointement.

Il s’y est installé, j’y ai déménagé une bonne partie de mes affaires et en attendant ma mutation, qui tardait, j’y allais très souvent. Éric me faisait visiter la région, il m’entourait d’égards. Il a su se rapprocher, trop, je l’ai compris après, de mes amis.

Il faut du recul pour se rendre compte qu’en fait une personne a cherché à faire le vide autour de vous…

Je n’ai jamais été mutée à Montpellier, j’ai eu de moins en moins de nouvelles d’Éric, jusqu’à ne plus arriver à le joindre.

Je suis allée à l’appartement, il n’y était pas, j’ai récupéré quelques objets qui m’étaient chers et lui ai laissé un mot pour lui dire que je mettais fin à la location et que je viendrais récupérer mes affaires.

Le week-end suivant j’y retourne avec Joan : l’appartement avait été vidé. J’ai retrouvé les mises en demeure de l’huissier, réclamant les loyers qu’il ne payait pas alors que je lui versais ma part.

Je n’ai plus jamais eu de ses nouvelles. De l’huissier oui…

Il s’appelait Flamant.

Il était arrivé à m’éloigner de Ma Bea, de ma grenouille que j’avais connue grâce à un crapaud.

Je me moque maintenant de retrouver un jour le crapaud ou Éric Flamant, mais Ma Béa, elle, je ne l’oublierai jamais, comme Cyrielle, qui doit être maintenant une superbe femme de 25 ans.

 

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