Jeudi 15
juin
Une semaine
sur le Bella Desgagnés
Une semaine
un peu hors du temps. Ce temps justement qui ne nous a pas trop gâtés, mais c’est
comme ça, je crois, qu’il faut la voir cette Basse Côte Nord, pour partager un
peu avec ceux qui la vivent « à l’année longue ».
Embarquement
rapide. Une constatation : la moyenne d’âge est élevée. Notre cabine n’est
pas bien grande, mais elle est confortable. Son hublot nous laisse voir l’immensité
de l’eau qui nous entoure. Quelquefois calme, quelquefois « qui brasse
fort ».
Nous n’avons
pas le mal de mer, et j’avoue que j’étais bien, allongée, quand ça remuait un
peu dans tous les sens. Bon, dans les salons communs, les passagers, dont nous,
marchaient comme s’ils avaient bu un coup de trop. Les rampes présentent
partout sont les bienvenues.
Et puis
quelquefois des bruits de gros chocs sur la coque : des blocs de glace. Il
suffit de la savoir. L’imagination peut nous emmener dans « Titanic »,
mais non, tous les risques sont maitrisés.
Les repas
sont à heure fixe et nous avons été placés dans le premier service, celui où l’on
mange encore plus tôt que l’heure québécoise habituelle. Ils sont bons ces
repas, riches en produits de la mer. Une cuisine soignée, inventive. Et l’adorable
Charlène qui s’occupe de nous, en comprenant rapidement les goûts et
préférences de chacun.
Le hasard a
fait que nous nous sommes retrouvés à la table de Micheline et Normand,
québécois pur jus. Agés de 78 ans, mais pleins de soif de connaissance. Leur
érudition, leur culture, nous impressionne. Leur connaissance du monde par
leurs très nombreux voyages aussi. Ils seront un des très bons souvenirs de
cette semaine hors du temps.
Le temps se
partage entre ces repas, ces moments au salon, où le wifi aléatoire me permet
de savoir un peu ce qu’il se passe ailleurs, où l’on aperçoit des baleines, des
phoques, des belugas. Et où Valérie et Rachelle, jeunes membres du ROMM, Réseau
d’Observation des Mammifères Marins, sont à la fois barmaids, animatrices, et
nous présentent d’intéressantes « capsules » qui nous en apprennent
beaucoup sur tout ce que nous pouvons observer.
Et puis les
escales. Pour les premiers jours, nous sortions habillés « comme en plein
hiver », heureusement que nous avions prévu de quoi faire des multi
couches, ce n’était pas de trop. Et les gants et écharpes étaient nos précieux
alliés face à une bruine froide accompagnée de vent.
Notre
expresso à Havre St Pierre, à l’aller nous n’avons pas pu le prendre en terrasse,
chez Julie, mais il était bon quand même, pour les amateurs de bon café que
nous sommes.
Harrington
Harbour (lieu de tournage de « la grande séduction », pour ceux qui
se souviennent de cette pépite du cinéma québécois), nous l’avons visité avec
Micheline, qui y a travaillé un an il y a 25 ans. Elle était missionnée pour
fermer le centre d’accueil, et, au contraire, elle a permis de le laisser
ouvert avec un meilleur accueil. Nous avons partagé son émotion de se retrouver
là tant d’années après.
Un seul
commerce, le magasin général, petit mais très peuplé, lieu de rencontre
apparemment, où l’on vend un peu de tout.
Des planchers
de bois qui sont les rues du village. Des quads qui les parcourent, plus
particulièrement le jour où le bateau qui nous promène apporte les denrées, les
commandes, tout ce dont le village à besoin. Et où des locaux descendent, qui s’étaient
éloignés pour quelques jours ou quelque temps.
Il faut dire
que depuis Kegaska il n’y a plus de route qui dessert ces villages, seuls les
bateaux et quelques avions quand c’est nécessaire.
Quand nous
remontons sur le bateau, nous apprécions le plancher chauffant de la salle de
bain de notre cabine. Nous y accrochons nos vêtements humides et ils sont vite
secs.
Blanc
Sablon, dernier village avant le Labrador. Là nous profitons de l’excursion, à
bord du bus scolaire que conduit Tony après avoir emmené les enfants à l’école.
Il fait très froid aussi, mais l’immensité des paysages nous fait oublier la
température. Sabrina, petite fille de Tony, nous raconte le village. Elle est
une toute jeune maman, et elle vit ici depuis toujours. Leur bonne humeur à
tous deux est un des bons souvenirs que nous gardons.
Un arrêt
près d’une chute d’eau, et là, à 20 ou 30 mètres, un ours brun qui nous
regarde, un peu interloqué mais placide. Il se laisse photographier sans problème.
Tony nous dira que c’est un jeune d’une année. Une belle bête quand même !
Le bateau
fait demi-tour à Blanc Sablon. Je suis heureuse d’avoir vu le grand panneau qui
annonce la province de Terre Neuve et Labrador. Ce sentiment de bout du monde…
Nous
descendrons prendre l’air à Tête à la Baleine. « Prendre une marche »
c’est toujours agréable et bénéfique.
Puis à La
Romaine où nous marcherons un bon kilomètre pour arriver au village Innu de
Unamen Shippu. Nous voyons peu les autochtones,
qui n’apprécient peut-être pas de voir passer ces curieux une fois par semaine.
Leurs chiens, nombreux, sont eux ravis de venir vers nous recueillir quelques
caresses.
Quelle est
leur vie, de quoi vivent-ils. Nous n’en savons pas grand-chose et cela m’intrigue.
Le temps s’est
radoucit, la bruine froide et ventée s’est calmée. Une veste suffit.
Cette fois,
à Havre St Pierre, l’expresso de chez Julie nous le buvons en terrasse, et qu’est-ce
qu’il est bon !
Notre
dernière escale sera à Port Menier, sur l’île d’Anticosti. Cette île où je ne
pensais pas mettre les pieds un jour.
Menier comme
le fondateur des chocolats du même nom, français, qui a trouvé ici un terrain
de chasse idéal et y a fait construire un village. L’île est grande (220 km de
long) et ne comprend que ce petit village, mais un des endroits au monde où la
densité de faune est la plus importante. Les chevreuils sont rois et s’invitent
partout.
Les
chasseurs aiment l’endroit, mais la chasse est très réglementée.
Beau
souvenirs des deux dernières soirées à bord du bateau. Celle où le capitaine
est venu nous parler de la vie de l’équipage, de leurs divers travaux à bord.
Celle où le chef grutier est venu nous raconter comment, à chaque escale, toute
une équipe s’organise pour décharger et charger toutes sortes de marchandises,
de véhicules. Ce bateau est pour nous un lieu de repos et de découverte, mais
pour tous ceux qui s’agitent à bord et à quai pour desservir au mieux ce coin
perdu de pays, c’est une logistique et une organisation impressionnantes.
A chaque
escale, les locaux qui attendent quelque chose ou quelqu’un sont là,
impatients. Nous, nous sommes les touristes qui sommes là pour le plaisir.
Et quel
plaisir !
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