15 juin 2023

Une semaine en Basse Côte Nord

 

Jeudi 15 juin

Une semaine sur le Bella Desgagnés

Une semaine un peu hors du temps. Ce temps justement qui ne nous a pas trop gâtés, mais c’est comme ça, je crois, qu’il faut la voir cette Basse Côte Nord, pour partager un peu avec ceux qui la vivent « à l’année longue ».

Embarquement rapide. Une constatation : la moyenne d’âge est élevée. Notre cabine n’est pas bien grande, mais elle est confortable. Son hublot nous laisse voir l’immensité de l’eau qui nous entoure. Quelquefois calme, quelquefois « qui brasse fort ».

Nous n’avons pas le mal de mer, et j’avoue que j’étais bien, allongée, quand ça remuait un peu dans tous les sens. Bon, dans les salons communs, les passagers, dont nous, marchaient comme s’ils avaient bu un coup de trop. Les rampes présentent partout sont les bienvenues.

Et puis quelquefois des bruits de gros chocs sur la coque : des blocs de glace. Il suffit de la savoir. L’imagination peut nous emmener dans « Titanic », mais non, tous les risques sont maitrisés.

Les repas sont à heure fixe et nous avons été placés dans le premier service, celui où l’on mange encore plus tôt que l’heure québécoise habituelle. Ils sont bons ces repas, riches en produits de la mer. Une cuisine soignée, inventive. Et l’adorable Charlène qui s’occupe de nous, en comprenant rapidement les goûts et préférences de chacun.

Le hasard a fait que nous nous sommes retrouvés à la table de Micheline et Normand, québécois pur jus. Agés de 78 ans, mais pleins de soif de connaissance. Leur érudition, leur culture, nous impressionne. Leur connaissance du monde par leurs très nombreux voyages aussi. Ils seront un des très bons souvenirs de cette semaine hors du temps.

Le temps se partage entre ces repas, ces moments au salon, où le wifi aléatoire me permet de savoir un peu ce qu’il se passe ailleurs, où l’on aperçoit des baleines, des phoques, des belugas. Et où Valérie et Rachelle, jeunes membres du ROMM, Réseau d’Observation des Mammifères Marins, sont à la fois barmaids, animatrices, et nous présentent d’intéressantes « capsules » qui nous en apprennent beaucoup sur tout ce que nous pouvons observer.

Et puis les escales. Pour les premiers jours, nous sortions habillés « comme en plein hiver », heureusement que nous avions prévu de quoi faire des multi couches, ce n’était pas de trop. Et les gants et écharpes étaient nos précieux alliés face à une bruine froide accompagnée de vent.

Notre expresso à Havre St Pierre, à l’aller nous n’avons pas pu le prendre en terrasse, chez Julie, mais il était bon quand même, pour les amateurs de bon café que nous sommes.

Harrington Harbour (lieu de tournage de « la grande séduction », pour ceux qui se souviennent de cette pépite du cinéma québécois), nous l’avons visité avec Micheline, qui y a travaillé un an il y a 25 ans. Elle était missionnée pour fermer le centre d’accueil, et, au contraire, elle a permis de le laisser ouvert avec un meilleur accueil. Nous avons partagé son émotion de se retrouver là tant d’années après.

Un seul commerce, le magasin général, petit mais très peuplé, lieu de rencontre apparemment, où l’on vend un peu de tout.

Des planchers de bois qui sont les rues du village. Des quads qui les parcourent, plus particulièrement le jour où le bateau qui nous promène apporte les denrées, les commandes, tout ce dont le village à besoin. Et où des locaux descendent, qui s’étaient éloignés pour quelques jours ou quelque temps.

Il faut dire que depuis Kegaska il n’y a plus de route qui dessert ces villages, seuls les bateaux et quelques avions quand c’est nécessaire.

Quand nous remontons sur le bateau, nous apprécions le plancher chauffant de la salle de bain de notre cabine. Nous y accrochons nos vêtements humides et ils sont vite secs.

Blanc Sablon, dernier village avant le Labrador. Là nous profitons de l’excursion, à bord du bus scolaire que conduit Tony après avoir emmené les enfants à l’école. Il fait très froid aussi, mais l’immensité des paysages nous fait oublier la température. Sabrina, petite fille de Tony, nous raconte le village. Elle est une toute jeune maman, et elle vit ici depuis toujours. Leur bonne humeur à tous deux est un des bons souvenirs que nous gardons.

Un arrêt près d’une chute d’eau, et là, à 20 ou 30 mètres, un ours brun qui nous regarde, un peu interloqué mais placide. Il se laisse photographier sans problème. Tony nous dira que c’est un jeune d’une année. Une belle bête quand même !

Le bateau fait demi-tour à Blanc Sablon. Je suis heureuse d’avoir vu le grand panneau qui annonce la province de Terre Neuve et Labrador. Ce sentiment de bout du monde…

Nous descendrons prendre l’air à Tête à la Baleine. « Prendre une marche » c’est toujours agréable et bénéfique.

Puis à La Romaine où nous marcherons un bon kilomètre pour arriver au village Innu de Unamen Shippu.  Nous voyons peu les autochtones, qui n’apprécient peut-être pas de voir passer ces curieux une fois par semaine. Leurs chiens, nombreux, sont eux ravis de venir vers nous recueillir quelques caresses.

Quelle est leur vie, de quoi vivent-ils. Nous n’en savons pas grand-chose et cela m’intrigue.

Le temps s’est radoucit, la bruine froide et ventée s’est calmée. Une veste suffit.

Cette fois, à Havre St Pierre, l’expresso de chez Julie nous le buvons en terrasse, et qu’est-ce qu’il est bon !

Notre dernière escale sera à Port Menier, sur l’île d’Anticosti. Cette île où je ne pensais pas mettre les pieds un jour.

Menier comme le fondateur des chocolats du même nom, français, qui a trouvé ici un terrain de chasse idéal et y a fait construire un village. L’île est grande (220 km de long) et ne comprend que ce petit village, mais un des endroits au monde où la densité de faune est la plus importante. Les chevreuils sont rois et s’invitent partout.

Les chasseurs aiment l’endroit, mais la chasse est très réglementée.

Beau souvenirs des deux dernières soirées à bord du bateau. Celle où le capitaine est venu nous parler de la vie de l’équipage, de leurs divers travaux à bord. Celle où le chef grutier est venu nous raconter comment, à chaque escale, toute une équipe s’organise pour décharger et charger toutes sortes de marchandises, de véhicules. Ce bateau est pour nous un lieu de repos et de découverte, mais pour tous ceux qui s’agitent à bord et à quai pour desservir au mieux ce coin perdu de pays, c’est une logistique et une organisation impressionnantes.

A chaque escale, les locaux qui attendent quelque chose ou quelqu’un sont là, impatients. Nous, nous sommes les touristes qui sommes là pour le plaisir.

Et quel plaisir !

 

 

 

 

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